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Sombres dons

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Brownie
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Ex Modératrice du Pays des merveilles ~ Chapelière folle
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MessageSujet: Sombres dons Sombres dons I_icon_minitimeJeu 2 Juin - 22:13:20

Prologue
Un bruit bien familier me sortit du sommeil. Je risquai un œil en direction de mon réveil.
Minuit trois.
Je soupirai, avant de sauter du lit en grognant, et d’entrouvrir les volets sans trop d’entrain.
Un peu plus de six mètres en dessous de moi se dressait mon jardin. Pas très grand, délimité par une palissade on ne peut plus banale. Adossé à un barbecue enseveli sous la poussière, un coffre à jouets.
Un frisson parcourut mon échine.
En bas, dans le jardin, le ballon de basket rebondissait tout seul sur le gazon. Tout seul ? Ou pas.
Je soupirai à l’idée de devoir appeler à l’aide, mais si je ne voulait pas que cet imbécile réveille tout le quartier, je n’avais pas vraiment le choix.
Moment de réflexion intense.
Je claquai sèchement la fenêtre et je traversai ma chambre d’un pas moyennement décidé. Je saisit mon portable – le plus vieux modèle que je n’avais jamais, vu, tellement pourri que je me demande si ma mère n’était pas allée pleurer devant le vendeur pour qu’il lui ressorte ce modèle des années soixante qui ne devait plus être en vente depuis… bah depuis les années soixante- et je composai le numéro d’Alice.
Bip. Bip. Biiiip.
Bouge toi, Alice, bouge toi…
« Marine ? T’as vu l’heure qu’il est ?!?
Je déglutis.
-Heu…. Je….
-"Tu" quoi, bon sang !?
-C’est lui, il est revenu…
-Mais de quoi tu….
-Le fantôme du jardin.
-Tu l’as vu ?
-Non, ça c’est ta spécialité. D’ailleurs si tu pouvais le renvoyer chez lui ce serait cool.
Pas si dur que ça de répondre du tact au tact finalement. Et c’est un point de marqué pour moi !
-Mmh. Pas une bonne idée. Si t’apprends pas à te débrouiller seule, ça va pas le faire.
-Mais...
-Écoute, Marine, t’es bien sympa mais si je pouvais éviter de faire un kilomètre de vélo jusqu’à chez toi en pyjama toutes les semaines pour dire de se casser à un fantôme ça me gênerait pas. Alors même si toi tu le vois pas, lui il t’entend donc tu vas le voir tu lui montre ton téléphone tu lui raconte ce que tu veux et tu me fous la paix une bonne fois pour toutes !
-Attends !
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MessageSujet: Re: Sombres dons Sombres dons I_icon_minitimeSam 23 Juil - 15:33:24

Le lendemain matin....
-Bon, Claire, tu te dépêche, sinon ta sœur va être à la bourre, là ! grogne ma mère à ma sœur.
Je ne peux pas m’empêcher de regarder ma montre. Sept heure moins dix. Génial.
Ma sœur me fait signe de monter dans sa voiture- pardon, dans son tacot- et démarre le moteur.
Sachant que Marine à cours à 8 heures Cinq ce matin avec Madame Delaye, qu'elle est partie à sept heure moins dix de chez elle et
qu'elle met environ 25 minutes à couvrir là distance qui sépare sa maison du collège, pouvez vous, je vous prie, me donner le résultat de l'équation ?
Au moins une bonne heure de colle, vu les rapports que j’entretiens avec ma prof de maths.
J'arrête de faire l'imbécile et j'attache ma ceinture. Je vais même pas pouvoir aller dire à Alice a quel point je m'en suis bien tirée hier soir, et ça, c'est ce qui me dégoute le plus.
Quelques vingt-cinq minutes plus tard, j'arrive au collège.
Grand portail métallique, bâtiments gris, et après les adultes se plaignent que les élèves comparent leur collège à une prison ?
J'appuie sur le bouton et j'attends que la secrétaire vienne m'ouvrir.
"Tiens, Marine, soupire la vielle dame d'un air désolé, et un peu déçu.
-La circulation, vous savez...
-Elle n'empêche pourtant pas les autres d'arriver à l'heure.
-Je...
-C'est bon, file en cours.
Je ne me fais pas prier.
***
Trois coups de poignets contre la porte de la salle A3 suffisent à faire comprendre aux autres que je suis là.
-Ah, oui, Marine. J’espère que tu as une bonne raison d'être en retard, me lance la prof
Je ne lui réponds même pas. Je me contente de lui montrer le mot signé du CPE.
-Heu, très bien, merci. Tu peux aller à ta place.
J'ignore les regards méprisants d'Alice et je pose ("balance" serait plus approprié, mais je vais pas m'étendre la dessus) mon sac sous la table que je partage avec Mélo.
Mélo, c'est ma meilleure (et seule) amie. On s'est rencontrées en primaire (CP, je crois) et depuis, on s'est jamais quittés d'une semelle. Enfin, si (et heureusement d'ailleurs parce que je supporte pas les pots de colle), mais on s'est jamais prises la tête, quoi.
-'lut.
Elle ne me réponds pas.Je sors mon livre "Mathématiques 4eme, collection phare" et je l'ouvre page 208. Encore des exos. Cinq minutes plus tard, j'ai tout fini.
Je sors un carnet à dessin de mon sac et je pousse le cahier vers Mélo qui à l'air de peiner un peu.
-Mademoiselle Sten, on peut savoir ce que vous fabriquez ?me demande la prof
-Rien. J'ai fini les exercices. je lui répond.
-Tous les exercices ?
Je déteste ce ton lourd de reproche qui m'est tout particulièrement destiné.
-Oui, les 6 exercices.
Elle semble déconcertée. Là, je crois que je l'ai surprise.
-Heu.... Bien. Alors, pendant que je vérifie vos réponses, allez aider vos camarades qui n'ont pas compris.
Elle me montre Alice du doigt. Je retiens un soupir.Je crois que je n'ai pas le choix.
J'arrive devant la table.
-Ah,Marine, c'est pas trop tôt !
Ben voyons...
-Alors, comment ça c'est passé hier soir ?
A suivre...
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MessageSujet: Re: Sombres dons Sombres dons I_icon_minitimeVen 2 Sep - 15:35:59

Je vide le contenu de mon sac dans mon casier, le feu aux joues. Et dire que j'étais si fière de mon intervention d'hier soir !
Alice ne s'est pas gênée pour me renfoncer.
Bon, d'accord, menacer un fantôme de le renvoyer au paradis alors qu'on en a pas le pouvoir, c'est - légèrement- stupide.
Oui, je l'avoue,lui dire que s'il ne vous obéit pas vous allez l'envoyer de l'autre coté du mirroir -un des rares trucs qui font peur aux fantômes, sans motif apparent puisque leur sois disante dimension n'existe pas- alors que.. Eh bien, que ce n'est tout simplement pas possible puisqu'il n'y a pas d'autre coté du mirroir (je vous assure, j'ai bien essayé d'y passer petite, et le seul truc que j'ai gagné c'est des sales écorchures ), ça l'est encore plus.
M'enfin, c'était pas une raison. Alice n'avait pas à me dire... Ce qu'elle m'a dit (je vous épargne les insultes qu'on s'est envoyés, ça pourrait en choquer) Et puis, c'était quoi son problème ? Il était parti, le fantôme. Et s'était elle qui voulait pas venir me le virer.

Et en plus, après ça elle ose me demander de la rejoindre ce soir vers 6 heures au terrain vague derrière le collège.
Je sort le papier froissé de ma poche, avant de le déchirer.
Je suis pas débile au point d'oublier l'heure, non ?
Enfin, j'èspere. Juste pour le plaisir de donner tort à Alice.
***
Le reste de la journée est vite passé. Rien de bien interressant, sauf peut être quand le prof à rendu son 10 / 20 à Alice.
Sauf qu'avec Melo, on à bien été obligées de cesser de rire quand le prof nous à rendu nos notes. 7/20. Alors que j'avais bossé 2 heures dessus.
Le cours de français, dernier cours de la journée, m'a semblé vraiment court, par rapport à d'habitude. Et facile, malgrès la traditionnelle interro surprise de milieu de cours. Quand la sonnerie à...sonné, tout le monde s'est levé et est sorti. On avait déja rangé nos affaires depuis cinq minutes.
J'ai pris le chemin de mon quartier à pied -sans pour autant trainer, je voulais être avant Alice au terrain, mais pas trop non plus (même s'il me restait une bonne heure)
Pour une fois, j'étais vraiment de bonne humeur. Et pourtant, je sentais que ça n'aillait pas durer.

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MessageSujet: Re: Sombres dons Sombres dons I_icon_minitimeLun 24 Oct - 21:24:01

Il est six heures tapantes lorsque je vois arriver Alice en haut de la colline. Elle porte une besace bleue assortie à la couleur de ses yeux et elle à attaché ses cheveux en une longue queue de cheval brune.
-Tiens, t'es ponctuelle pour une fois, remarque-elle non sans un sourire. Allez, on y va de suite, on a du boulot ce soir.
Je peine à masquer ma surprise. C'est la première fois que je vois Alice sourire-non, me sourire. Mais je n'ai pas le temps de m’extasier là dessus car elle à déjà emprunté le sentier de la forêt.
-Tu peux juste m'expliquer où tu m'entraine ?
Elle ralentit le rythme pour que j'arrive à son niveau.
-Mes parents sont policiers, et hier ils ont étés appelés à se rendre dans la forêt vers 22 heures.
-Et alors ?
-Une grand mère un peu gâteau qui habitait dans la zone disait avoir vu une grande lumière bleue peu de temps avant. Bien sûr, aucun des flics ne l'ont crue.
-Tu m’excuseras, mais....
-Ils on retrouvé un type mort. Et ils n'ont pas déterminé comment.
Je ravale un hoquet de surprise. Soudain, le monde me semble bien plus froid. Je remonte le col de mon manteau.
-Tu... Non, ce n'est pas possible, je grommelle.
-C'est ce que je me suis dit au début, répond Alice sans s’arrêter de marcher.
On arrive à la lisière du bois, et Alice pose sa besace au sol, avant de s’effondrer sur une pierre.
-Ça va ?
Ma question semble l'étonner parce qu'elle lève la tête avant d'acquiescer.
-Oui, c'est rien. Allons-y.
Plus on avance dans la forêt, plus j'ai l'impression que quelque chose cloche. Mais je n'ai pas le temps de trouver quoi.
Parce qu'une meute de gros chiens nous sautent dessus.
**
La première chose qui me vient à l'esprit, c'est que je suis tombée dans un piège. La deuxième, c'est l'instinct de survie. Ça fait tilt dans ma tête. Un chien se rue sur moi, je lui fiche un coup de pied en plein coup. Je ne réfléchis plus, j'agis. Coup de poing, esquive, coup de pied.... Des techniques, des enchainements dont je ne me serai jamais crue capable. Mais ou donc ai-je appris à faire ça ? Un dernier chien se rue sur moi, mais Alice l’assomme avec son sac.
-Et un de moins ! je lance.
-Te réjouis pas trop vite.
Je me retourne. Ce n'est pas Alice qui a parlé.
C'est un type encapuchonné, habillé de la tête aux pieds en noir. Et, petit détail non négligeable, il a un pistolet à la ceinture.
Je peux le lui prendre. J'en suis capable, je le sais. Mais quelque chose en moi me hurle de ne pas le faire. Le type braque son arme sur Alice, qui cherche désespérément du regard quelqu'un qui pourrait nous sortir de ce mauvais pas. Mais personne ne vient.
-Mettez vous à coté ! nous crie le type. Et un seul faux pas, je tire.
D'autres hommes en noir arrivent derrière lui. Et je commence à penser que je suis vraiment très mal fichue.
Plusieurs pistolets de taille diverses se pointent vers nous, et le premier -leur chef, sans doute- commence à nous interroger sur notre identité.
-Vos noms, crétines, donnez vos nom !
-Je parle pas aux inconnus ! Lui crache Alice
Un des types s'avance vers nous.
-Eh, toi, je te reconnais ! Braille il
Je mets un instant à comprendre que c'est à Alice qu'il parle.
-Ah oui ? Voyez vous cela ! répond-elle d'un air dégouté.
-Chef, continue l'autre sans se soucier de mon amie, c'est elle, la gamine des deux nécromanciens qu'on à tués il y a 10 ans, elle à la cicatrice !!
-Mhh, inintéressant, lâche le dénommé chef.
J’ai à peine le temps de voir le type attraper son pistolet et le pointer sur nous. Mon cœur se met à battre plus vite, et je sens le pouvoir monter en moi. Cet imbécile tire, et soudain une lumière éclatante envahit mes yeux . Puis je me sens tomber, et je m’évanouis.
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MessageSujet: Re: Sombres dons Sombres dons I_icon_minitimeVen 30 Déc - 18:50:16

Chapitre 4
Quand je me réveille enfin, j'ai un mal de tête inimaginable et je ne sens plus mes bras. C'est seulement au bout de cinq minutes que j'arrive enfin à me lever. Où suis-je ? Je n'en ait aucune idée.
Je regarde autour de moi. L'endroit ne me dit rien, je ne pense pas être déjà venue ici. Etrange...
Et c'est alors que tout me reviens. L'attaque. Les menaces des types en noir. Et l'explosion.
Car c'est bien une explosion qui a eut lieu, au moment où le chef à tiré sur Alice. Alice ! Je l'avais complètement oubliée, celle-là. Où est-elle ? A-elle pu s'échapper au bon moment, comme moi ? Ou est elle restée là bas, à la merci de ces gens ?
Pendant quelques instants, j'en oublie même toute la haine que je ressens pour cette fille. Après tout, n'est elle pas un des seules filles de la ville à pouvoir me comprendre ? La seule fille de la ville à en être capable ?
Après une brève pensée pour elle, j'en reviens à mon cas. Comment suis-je arrivée ici ?
Des dizaines de solutions imaginables.
Deux solutions impliquant la magie.
Mais aucune solution concrète (pour une personne normale, s'entend.)
Bref, à part ça tout va bien.
J'inspire. J'expire. Mais mon cœur continue de battre à deux cent à l'heure. Fichu stress !
Soudain, je remarque l’entaille au niveau de mon coude gauche, et le sang qui commence à couler. Si je ne l’arrête pas, je n’irais pas bien loin comme ça.
Je vide mes poches. Ah oui, parce que, pour couronner le tout, je n'ai pas de sac, rien de plus que le contenu de mes poches, c'est à dire mes clés de maison (encore faudrait il que je retrouve la maison), mon téléphone (je doute franchement que le réseau passe, par ici) et un mars (je suis gourmande et j'assume)... qui doit déjà être fondu dans la poche gauche de mon jean (comme ça, en plus j'aurais un truc mou et collant sur moi ! Génial !)
Et dans tout ça, pas de mouchoirs pour essuyer mon bras.
L'idée du siècle, tu parles.... Mon moral retombe aussi vite qu'il est monté. Et maintenant, je fais quoi ?
Soudain, un bruit de voix se fait entendre. Je me fais toute petite, dans ma cachette. Puis le silence reviens comme si de rien était.
"Et maintenant, j'entends des voix en plus...."
Quand on parle du loup, tiens... Les voix reviennent, plus distinctement cette fois ci, accompagnés par la lumière d'une bougie.
Quelqu'un descend !
Je ferme les yeux, et je prie très fort. "Faites qu'elle s'en aille, pitié, qu'elle s'en aille..."
Et avant que j'ai le temps de claquer les doigts, une lumière blanche m'aveugle, comme au moment de l'attaque. Mais cette fois-ci, point de téléportation bizarre ou autre. La femme est projetée au mur avec une violence inouïe, par une force invisible.
Je reste figée d'effroi. Puis, prenant mon courage à deux mains, je m'approche doucement. Elle ne respire plus. Je mets quelques instants à me rendre compte de l'ampleur de mon geste. Cette femme, cette innocente, est morte.
Je me rapproche d'elle. Non, c'est bon, son coeur bat encore. Je pousse un long soupir de soulagement.
Et dire que j'aurais pu la tuer.... J'en ai des frissons.
Mais ça ne change rien à ma situation.
Je dois partir d'ici. De toute urgence.
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MessageSujet: Re: Sombres dons Sombres dons I_icon_minitimeSam 19 Mai - 19:11:00

Sombres dons Ch510
Je cours. Je ne respire plus qu’à peine, mes cheveux sont trempés, il pleut, j’ai froid. Mais je cours quand même. Je ne sais pas où je suis, mais je cours. Je ne sais pas ce que je fuis, mais je cours. J’ai peur. J'ai l'impression d'être dans un cauchemar.
Devant moi, des ruelles pavées plus étroites et désertes les unes que les autres se dressent. Toujours les mêmes ruelles, à un point tel que j’en perds la tête. Je tourne en rond, je n’avance pas. Je vais finir par me perde- que dis-je ? Je suis perdue.
Je tourne la tête. Derrière moi, rien. Aucune lumière, aucun signe de vie, rien ni personne. Et soudain, il arrive. Le noir. L’obscurité, oui, l’obscurité. Je la vois voler vers moi, se frayer un chemin à travers les immeubles sombres et insalubres qui bordent la ruelle. Le noir me poursuit, je suis poursuivie par l’obscurité elle-même. Vue de près, on dirait une flaque immense de pétrole, noire et flasque, sans yeux ni bouche, mais vivante. Bon sang, ça n’a aucun sens.
Je sens un éclat de rire ironique me monter aux lèvres, mais il reste coincé à ma gorge. Je manque de m’étouffer, je suis assaillie par une quinte de toux. Puis je reprends ma course. Je sens mes jambes se dérober, j’ai mal. Je me prends les pieds entre deux pavés du sol plus éloignés que les autres.
Je tombe. Je n’arrive pas à me relever. L’obscurité déferle sur moi. Je me sens mourir, et j’en ressens presque un immense soulagement. Je souffle :« La fin de la souffrance ». Mes yeux se ferment.
Et c’est le noir.

***

« Maître, la demoiselle s’est réveillée.
J’ouvre un œil, puis l’autre. J’essaie de me lever, doucement, mais j’ai tellement mal que j’arrive tout juste à m’asseoir sur mon lit de fortune. Je n’ai aucune idée quant au lieu où je me trouve, mais je ne m’éternise pas là-dessus. Des pas se font entendre dans le couloir, et celui que l’inconnu à coté de moi a appelé « Maître » débarque dans la pièce. Il ne semble pas bien plus âgé que moi, peut être d’un ou deux ans, mais il me dépasse très certainement d’une bonne tête. Il est plutôt musclé, et des cheveux blonds et bouclés ornent son visage. Ses deux dorés ont quelque chose de rassurant, mais ça n’exclut pas la possibilité qu’il en ait après ma vie. Certes, je devenais parano, mais j’avais mes raisons, tout de même.
- Comment allez-vous ?
Il a posé la question sur un ton détaché, presque banal. Mais ça n’a rien changé pour moi et pour ce que je comptais faire. Je lance sur un ton froid, même dur :
-Qui êtes vous ?
-Nous vous avons trouvée évanouie dans la rue, et...
-Qui êtes vous ?
Je plante mes yeux dans les siens, je le soutiens du regard. Derrière nous, l’autre garçon, celui qui appelle le blond « maître », vient de laisser échapper une mimique amusée. Je lui lance un regard noir. Il doit avoir un an de moins que le grand blond, soit à peu près mon âge. Adossé au mur, il affiche une expression indéchiffrable, quoi que légèrement décontractée. Il passe une main dans ses cheveux nuit. Ses yeux gris passent de moi au blond. Finalement, il ajoute :
-Bon, on va pas aller bien loin comme ça. (il se tourne vers moi et poursuit :) Je m’appelle Elliot, et voici Colbat, mon maître.
Colbat a une moue contrariée. Il lance :
-Je t’ai déjà dit de me considérer comme un ami, pas comme ton supérieur ! Ces histoires de soumission entre familles n’ont pas à affecter notre amitié !
-Ce n’est pas si simple que ça, et tu le sais bien. Ces histoires de soumission, comme tu les appelles, ne sont pas à prendre au second degré.
Je relève avec un certain intérêt:
-Ces histoires de soumission ?
-Ouais. Ma famille m’a vendu à celle de Colbat en tant qu’esclave pour régler des dettes trop grosses pour eux.
-Dur.
Il acquiesce, avant de se pencher par une fenêtre que je n’avais jusqu’alors pas remarquée et qui donne très certainement sur une des multiples ruelles désertes de cet endroit mystérieux.
-Mais assez parlé de nous. Comment tu t’appelles, et comment tu t’es retrouvée ici ?
J’hésite. Leur dire la vérité, leur mentir ? Je ne sais pas. J’opte pour la seconde option.
-Melody, enchantée.
Melody, Melo. Ma meilleure amie. Elle me manque. Ma famille aussi, mais en ce moment, c’est sa présence, son cynisme et nos délires qui me manquent le plus. Où est-t-elle, en ce moment ? S’inquiète-t-elle seulement pour moi ? Je chasse ces sombres pensées d’un hochement de tête , avant de poursuivre :
-Si je peux me permettre... On est où ?
-Royaume de Carreau, treizième rue depuis le Palais royal.
J’étouffe un éclat de rire.
-Royaume de Carreau, et puis tu vas me dire qu’on est au pays des Merveilles, aussi ?
Colbat lève les yeux au ciel, mais je remarque qu’il sourit. Dans un sens, je suis rassurée qu’il n’ait pas mal pris ma remarque.
-J’aimerais bien, mais la situation du royaume ne correspond pas tout à fait à l’adjectif. Quant à Carreau, c’est le nom de famille de la famille Royale. Le nouveau Prince est un sale gamin égoïste et prétentieux dont la première action au pouvoir a été de renommer notre Royaume.
Elliot le fusille du regard.
-Colbat, apprends à la boucler un peu.
-Tu pense exactement la même chose que moi, inutile de prétendre le contraire, Elliot.
Je soupire.
-Hum, c’est pas que j’aie particulièrement envie de me joindre à ou d’interrompre ce charmant petit débat politique, mais on est où ? Je veux dire, quel monde ?
Les deux... amis se dévisagent, l’air surpris.
-Ne me dis pas que tu viens de...de l’Ailleurs ?
Nouveau soupir. Faut croire que je suis douée pour perdre le fil d’une conversation avec ces deux là, ou je ne m’appelle plus Marine. Ah, mais que dis-je, je ne m’appelle plus Marine maintenant. C’est Melody, question de sécurité. J’explique mon soupir, faute de pouvoir disparaître six pieds sous terre.
-L’ailleurs... Je ne sais pas ce dont vous parlez, mais si c’est bien ça à quoi vous pensez, en effet, je ne suis pas du coin.
Colbat et Elliot se consultent du regard. Quelque chose se déclenche en moi, comme une alarme, quand je vois les deux garçons poser simultanément leurs yeux sur moi.
-Alors, si j’ai bien compris, tu es terrienne... (Colbat se retourna vers Elliot :) On est mal, là..
J’essaie de cacher la surprise qui doit se peindre sur mon visage, sans succès. Une phrase se répète dans ma tête, une seule. Ils savent. Ils sont au courant. Elliot inspira un grand coup.
-Non. On va faire comme si de rien était, on dira que Melody est une cousine lointaine à toi des Terres Sombres et que tu l’héberges à cause des conflits militaires. On saura se débrouiller.
Nouvelle surprise, quoi que plutôt positive cette fois-ci. Mais l’offre reste inacceptable.
-Je.. Je ne veux pas risquer de vous mettre en danger.
C’est au tour de Colbat de prendre la parole.
-Non, Elliot a raison, si on le fait comme ça, ça ira très bien. Ne t’inquiète pas.
Je ne veux pas. Je ne veux pas qu’il leur arrive quelque chose par ma faute, même s’ils ne sont que des inconnus. Mais je ne vois rien à y redire.
-Très bien. Merci beaucoup.
-De rien, répondent-ils tous deux en chœur.
-Et si on te montrait un peu la ville, maintenant ?
J’accepte la proposition de Colbat avec un hochement de tête.J'aurais aussi des questions à leur poser, mais je le ferais en temps voulu.
Oui, c’est sûrement la meilleure idée.
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